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mercredi 11 juillet 2012

TEAMWORK EVOLUTION - EX-MAGNUM 747 - DAVID RAISON - MINI TRANSAT - DRAWINGS - PLANS TEAMWORK EVOLUTION 747 - MINI 6,50


TeamWork Evolution, ex-Magnum 747


Renouant avec la tradition des grandes heures de la plaisance de la Belle Époque, où les revues nautiques publiaient les plans des derniers voiliers innovants, nous reprenons le flambeau. Voici les plans du Mini Transat qui a révolutionné l’architecture navale l’année passée : TeamWork Evolution ou Magnum 747 de l’architecte David Raison !

©François Chevalier 2011


Le secret est tout relatif. En effet, si un architecte naval est capable de dessiner une coque qu’il imagine dans sa tête, il lui est tout aussi aisé de redessiner la carène qu’il a devant les yeux, quelle que soit sa forme. Cette opération est d’autant plus facilitée que les voiliers répondent à un règlement précis et rentrent dans le cadre d’une jauge.

Devant les réelles qualités du concept du Magnum, on est en droit de se poser un certain nombre de questions ! Pourquoi personne n’y avait pensé ? Comment se fait-il qu’un voilier avec une flottaison courte aille plus vite que les autres ? Et comment se comporte-t-il dans la mer formée ? Quel avenir pour cette idée, sur les 40, 60 et 70’ ? Notre voilier de croisière va-t-il ressembler à ce mastodonte ?
©François Chevalier 2011

Un petit retour en arrière fixera mieux les idées. La Mini est née en 1977, initiée par le Britannique Bob Salmon, en réaction au gigantisme de la Transat en solitaire Anglaise de 1976, avec le trois mâts Club Mediterranée d’Alain Colas de 72 mètres hors tout. À l’époque, 23 coureurs prennent le départ de Penzance vers Antigua sur des voiliers de 6,50 mètres. Daniel Gilard l’emporte sur un ‘Serpentaire’, suivi de Jaworski sur un prototype, Spanielek, puis Halvard Mabire sur un ‘Rêve de Mer’ (7,10 m) de Jean-Marie Finot, tronqué pour l’occasion, le quatrième est Jean–Luc Van den Heede sur un ‘Muscadet’ (6,40 m), Bruno Peyron était douzième sur un ‘Edel 6.60’ réduit.

L’idée est lancée, comment réduire un voilier le plus grand possible à 6,50 m, et augmenter sa raideur pour porter le maximum de voilure. Dix ans auparavant, Éric Tabarly avait donné la leçon aux Américains en faisant construire Pen Duick V pour une Transpacifique en solitaire. Pour la Mini 1979, le californien Norton Smith contacte l’architecte Tom Wylie pour lui concevoir un bateau exploitant les règles de la Mini, American Express. Longueur à la flottaison maximale, ballasts liquides latéraux, quille à bulbe, construction légère en bois moulé, spi en tête, le voilier est capable de courir plus de 200 milles en 24 heures. On est très loin des 4,45 nœuds de moyenne de Daniel Gilard deux ans avant. Cette même année, certains concurrents coupent leur ‘Surprise’ (7,65 m hors tout et 6,60 m à la flottaison) à la limite autorisée, 6,50 mètres. Puis les proto s’élargissent, le roof est supprimé, la Mini devient une course comme les autres, avec un classement pour les voiliers de série et un pour les protos. Un règlement finalement limite la largeur à 3 m, le tirant d’eau à 2 m le tirant d’air à 12 m, les points d’inflexions sont interdits d’un livet à l’autre, et un minimum de couple de redressement est obligatoire. Quelques jeunes architectes comme Sébastien Magnen ou Pierre Roland émergent devant les ténors, Finot-Conq, Berret ou Lombard, mais si les voiliers devenaient de plus en plus sophistiqués, aucune révolution n’apparaissait au niveau des carènes, de plus en plus légères, exploitant la largeur autorisée en tronquant les carènes à 3 m, créant ainsi un bouchain dit évolutif.
©François Chevalier 2011 - Les premiers scows apparaissent dés 1896, dès que la jauge à la longueur de flottaison  entre en vigueur et que les premiers défis sont lancés entre les Clubs des Grands Lacs et les New-Yorkais.
Les voiliers extrêmes ne peuvent naître que d’une libération de la jauge. En 1895, le Seawanhaka Yacht Club situé sur Long Island, lance une Coupe où seule la longueur de flottaison est comptée, soit 15 pieds (4,57 m). Dès l’année suivante, les prototypes les plus extravagants sont construits pour la Coupe, et deux ans plus tard, naît le type Scow, répandu largement depuis sur les Grands Lacs. Le Scow est un grand rectangle (de 5 à 12,50 m) ponté à fond plat, équipés de deux dérives et deux safrans, fait pour naviguer sur la tranche où il utilise toute sa longueur. Lorsque le vent descend des monts qui entourent les lacs, les voiliers s’envolent dans tous les sens et ceux qui ont le vent en poupe partent dans un planing irrésistible (33 nœuds). Bizarrement, ce type de voilier est resté local, malgré plusieurs démonstrations de sa supériorité en Europe dans les années 1950.
©François Chevalier 2011 - Le plus grand scow de la série, le A Scow, est capable de tirer un homme à ski nautique

Pour comprendre la démarche de David Raison, il convient d’analyser les facteurs de vitesse des voiliers actuels. D’abord, écartons la course à la longueur de flottaison, résolue rapidement par les premiers architectes qui se sont penchés sur la Mini, les 6,50 m sont atteints dès 1979. Le problème suivant a été de créer une longueur de la flottaison à la gîte, supérieure à la longueur du voilier, mais le gain est relativement minime. En allégeant les voiliers et en augmentant la surface de voilure, tout en augmentant la raideur, grâce à la quille basculante, le Mini part au planing et le problème de la longueur de flottaison devient annexe. David Raison intervient ici en posant les chose à plat : comment augmenter la raideur sans mettre le voilier en danger, ce qui est d’ailleurs limité dans la règle de la Mini. 

©François Chevalier - Le plan de forme des premiers Scows ont quelques similitudes avec les lignes du TeamWork 747 de David Raison.

L’idée d’un Scow à haut franc bords germe alors. Au lieu de basculer sur l’étrave, la flottaison à la gîte se décale latéralement, produisant un couple de rappel beaucoup plus efficace. La quille reste dans l’axe de la flottaison quel que soit l’angle de gîte. Reste à modérer cette étrave de cachalot pour limiter les coups de butoirs dans les vagues. Mais en remontant légèrement cette étrave, le voilier se soulève rapidement et glisse sur l’obstacle au lieu de foncer dedans. La preuve par neuf est faite, David Raison remporte la Transgascogne et la Mini Transat, et crée en même temps une nouvelle esthétique à laquelle il faudra s‘habituer, la victoire impose sa loi !

©François Chevalier - 2011

À plat, les lignes de formes du Magnum sont celle d'une planche à voile. À la gîte, l'angle de la flottaison avec l'axe du voilier est plus de deux fois moins important que sur un Mini traditionnel.


















Si David a trouvé une faille où il s’est glissé, d’autres architectes sont sur une voie parallèle, notamment Bruce Farr sur le nouveau Volvo 70 Abu Dabhi ou Juan Kouyoumdjian sur le 60’ Cheminee Poujoulat.

François Chevalier

Fiches techniques :

TeamWork 747
Architecte : David Raison
Chantier : David Raison, Frossay
Mise à l’eau : Avril 2010
Longueur : 6,50 m
Flottaison : 5,30 m
Bau : 3 m
Bau à la flottaison : 2,17 m
Bout-dehors : 3,50 m
Tirant d’eau : 2 m
Déplacement : 0,75 t
Voilure, près : 48 m2
Voilure, portant : 125 m2
Tirant d’air : 12 m

A Scow
Chantier : Melges Performances Sailboats
Équipage : 5 à 8
Création: 1901
Longueur : 11,50 m
Bau : 2,58 m
Déplacement : 0,84 t
Bout-dehors : 1,83 m
Voilure, près : 46,5 m2
Voilure, portant : 158 m2